J’adresserais volontiers à Emmanuel Macron ces lignes qu’en 1520, Luther écrit au Pape :
« Que fais-tu dans cette curie ? Infortuné Léon, tu sièges sur le plus périlleux des trônes […] Garde toi de prêter l’oreille à ces sirènes qui font de toi quelque chose de plus qu’un homme ordinaire, presque un dieu […] ne te laisse pas séduire par ceux qui font de toi le maître du monde ».
Luther dénonce les tentations et les illusions qui guettent les puissants. Il les appelle à l’humilité et au service.
Notre nouveau président a employé ces deux mots dans son allocution de dimanche soir ; j’espère qu’il ne s’agit pas pour lui seulement de mots.
Dans sa lettre de 1520, Luther s’en prend violemment à la curie romaine. Il serait injuste d’en faire de même pour la classe politique. On y trouve le meilleur (le dévouement) et le pire (la corruption).
Que la défaite suscite de l’amertume, des rancœurs et le désir de revanche ne me choque pas. Par contre, j’ai peur des passions, des excès de langage, des simplifications abusives des campagnes électorales. On y parle trop souvent, par exemple, de la souveraineté nationale, de l’Europe, de la mondialisation (la liste n’est pas complète) comme d’anges à honorer ou de dragons à abattre.
Le récit de la Genèse enseigne que les réalités de ce monde ne sont ni divines ni démoniaques. On ne doit ni les encenser ni les anathématiser, mais les désacraliser, les « démythologiser », pour en faire un bon usage et les mettre au service des humains.
André Gounelle
(pasteur, professeur honoraire de l’Institut Protestant de Théologie (Montpellier))
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