Marié, Catholique, membre engagé dans la Communauté de Chemin Neuf, Co-Président de l'Association Chrétienne Oecuménique de Normandie, délégué à l’œcuménisme et à la promotion de l'unité des chrétiens du diocèse de Rouen
Quelle est l’essence fondamentale de l’Eglise Orthodoxe ?
Une tempête significative
Quelques réflexions sur un article du R.P. Alexandre SCHMEMANN Un texte assez ancien [1] (Résumé ici) (50 ans) qui reste d’actualité et peut être utile pour comprendre -en partie- ce qui se joue en France depuis un an entre ce qui fut l’Exarchat Russe de France et d’Europe occidentale du Patriarcat de Constantinople devenu pour la plus grande part Archevêché des Eglises Orthodoxes Russes en Europe Occidentale sous l’égide du Patriarcat de Moscou et la partie constituant le Vicariat de Tradition Russe au sein de la Métropole Grecque-Orthodoxe de France restée dans le Patriarcat de Constantinople,
et aussi ce qui est à la base de l’incompréhension entre le Patriarcat de Constantinople et le Patriarcat de Moscou. Rivalité certes politique, mais aussi au-delà idéologique et religieuse.
Ce qui se passe avec le schisme ukrainien en est l’illustration.
Ce qui est en jeu est la manière dont les deux parties et leurs alliés considèrent l’essence profonde de l’Eglise Orthodoxe.
Pouvoir et/ou Unité
De par son histoire, le Patriarcat de Constantinople (dont la titulature complète du Patriarche est « Archevêque de Constantinople, nouvelle Rome, et Patriarche Œcuménique ») se conçoit comme Primat de l’Orthodoxie. Le premier concile de Constantinople, en 381, lui reconnaît une « prééminence d’honneur après l’évêque de Rome, car Constantinople est la Nouvelle Rome »[2].
Mais très vite, Basileus et Patriarche vont se considérer de fait comme les deux pouvoirs, politique et religieux, de la Cité de Dieu. Tous les autres leur étant subordonnés.
À partir du VIIe siècle, sous les coup de boutoirs des invasion arabo-ottomanes Byzance perd les territoires des patriarcats d’Antioche, Jérusalem et Alexandrie, ce qui réduit les Églises orthodoxes en Orient au seul patriarcat de Constantinople qui recueille les sièges des différents patriarcats à Constantinople sous son autorité.
La rupture consommée en 1054 entre l’Eglise de Rome et les Eglises Orthodoxes puis l’instauration du « Rum Millet » après la prise de Constantinople par les Ottomans en 1453 met de fait le Patriarche de Constantinople chef religieux de tous les chrétiens des territoires conquis (jusqu’aux portes de Vienne assiégée en 1683)
Au XIX° siècle le déclin du pouvoir ottoman et la libération des territoires conquis par les Turcs en Europe permet aux Eglises nationales de prendre leur autonomie face à Constantinople.
Empreinte de l’histoire
La mémoire inconsciente du Patriarcat de Constantinople est, semble-t-il, profondément marqué par cet imperium alors que les Eglises autocéphales le sont aussi mais de manière négative, leur autonomie ayant été plus conquise contre le Patriarcat de Constantinople qu’octroyée par lui.
D’autant plus qu’on peut considérer que si l’Empire Ottoman s’effondre avec la défaite de 1918 et le démembrement qui s’en suit qui débouche sur la révolution kémaliste laïque de 1923, le retour, à partir de 2003, d’un régime semi-dictatorial islamo-conservateur conduit par Recep Tayyip Erdogan replace le Patriarche de Constantinople dans la position précaire de ses prédécesseurs sous le joug Islamique.
L’aventure de ce qui aurait dû être le Grand et Saint Concile Panorthodoxe en est un exemple. Devant se tenir à Nicée -symbole fort à cause du Ier concile oecuménique- Erdogan “pour des raisons de sécurité” interdit le lieu. Le concile se tiendra en Crête. Et sera un échec, prélude au schisme Russe causé par les immixions de Constantinople en Ukraine
L’Eglise de Russie impose son autocéphalie au Patriarche de Constantinople dès 1589. Elle est jusqu’au XXe siècle la grande puissance du monde orthodoxe avant de subir soixante douze ans de régime communiste.
Quelle est l’essence de l’Orthodoxie ?
Les divers mouvements qui agitent le monde orthodoxe et les réactions qu’ils provoquent sont à observer en tenant compte de ce contexte. Au-delà des questions de pouvoir -si présentes bien sûr- la question qui est posée est bien celle de la nature profonde, de l’orthodoxie. C’est l’essence même de l’Orthodoxie comme communion synodale d’Eglises autonomes qui est en jeu.
[1] Un article du R.P. Alexandre SCHMEMANN écrit en 1971 à l’occasion du 30° anniversaire de l’autocéphalie de « L’Église Orthodoxe en Amérique » : SCHMEMANN Alexandre. Une tempête significative. Un document retrouvé. ( Traduction française du Père Stéphane Bigham de l’article « A Meaning-full Storm », Church, World, Mission : Reflections on Orthodoxy in the West, Crestwood, NY, St. Vladimir’s Seminary Press, 1979, pp. 85-116. En russe in Tserkov, mir, missia: mysli o Pravoslavii na Zapade, Sviato-Tikhonovskij – Institut, Moscou 1996).
Ecrit en 1971 à l’occasion du 30° anniversaire de l’autocéphalie de « L’Église Orthodoxe en Amérique »
« La tempête qu’a provoquée « l’autocéphalie » de l’Église orthodoxe en Amérique (E.O.A.) est probablement l’une des crises les plus significatives qui aient eu lieu dans l’histoire de l’Église orthodoxe depuis plusieurs siècles. Elle pourrait toutefois avoir des effets bénéfiques si les acteurs principaux de ce drame l’acceptaient, comme une occasion unique pour dissiper une confusion que, depuis trop longtemps, les Orthodoxes eux-mêmes ont voulu ignorer.
Si l’Amérique est soudainement devenue le centre d’attention et de passions des Orthodoxes, c’est parce que la situation de l’Église, ici, devait révéler tôt ou tard la nature véritable et la portée de ce qui est dû fait une crise panorthodoxe.
Le père Schmemann se propose ensuite « d’examiner la nature et les causes de la tempête qu’elle a provoquée, ainsi que les motifs profonds, parfois inconscients, que cachent ces réactions passionnées. »
Il propose d’abord quelques repères :
LA TRADITION ET LES SAINTS CANONS
Les Saints Canons ne sont pas la seule source de la Tradition canonique. Mais comme tradition première ils sont la norme et le standard de tout développement canonique ultérieur, le contexte même selon lequel, on doit évaluer toute l’histoire de l’Église – au passé, au présent ou au futur
Les mots clés du débat – autocéphalie, juridiction, etc. font appel à des précédents du passé, reconnu comme faisant partie de la Tradition
Le critère d’évaluation doit être avant tout ecclésiologique : il faut se référer à la doctrine permanente et immuable de la nature de l’Église, à son “essence”.
UNE TRADITION FORMEE PAR TROIS STRATES SUCCESSIVES :
La première strate : l’Église locale de l’Antiquité
L’Église locale c’est la communauté réunie autour de son évêque et de son clergé. Aucune Église n’est sous l’autorité d’une autre ; aucun évêque n’est sous l’autorité d’un autre. La nature même de cette dépendance, et donc de l’unité entre les Églises, n’est pas “juridictionnelle”. La primauté n’est pas un principe “juridictionnel”. Si, selon le Canon apostolique 34, les évêques, partout, doivent savoir qui est le premier parmi eux, le même canon définit la primauté par rapport à la Sainte Trinité, qui possède un certain ordre mais, bien sûr, aucune notion de “subordination”.
Finalement, il existe dès le début un centre universel d’unité – une primauté universelle. D’abord, c’était l’Église de Jérusalem, ensuite celle de Rome. C’est une primauté que même les théologiens romains modernes définissent (au moins pour la période ancienne) en termes de “sollicitude” plutôt que de “pouvoir” ou de “juridiction”.
Telle est la Tradition canonique essentielle.
C’est à la lumière de cette tradition, qu’on peut « lire » le véritable sens des strates suivantes :
La deuxième strate : l’Église de l’Empire
Avec la reconnaissance de la religion chrétienne comme religion d’Empire par Gatien (380) il y a intégration progressive des structures de l’Église dans le système administratif de l’Empire. Cette strate se distingue de la précédente, se fonde sur des principes différents et a donc des implications différentes pour l’ecclésiologie orthodoxe. Elle « exprime et ordonne la vie historique de l’Église, c’est-à-dire sa relation avec le monde au sein duquel elle est appelée à vivre sa vocation et sa mission. »
Voilà le cœur de la question : la nature de l’Église, qui n’est pas juridictionnelle, peut, et même doit inévitablement avoir “dans ce monde” une expression juridictionnelle qu’elle ne possédait pas avant et qui ne fait pas partie de sa nature essentielle.
L’idéal de la symphonie entre « l’imperium » et le « sacerdotium » exigeait un homologue ecclésiastique de l’empereur, un centre personnel de l’Église allant de pair avec le centre personnel de l’Empire.
Il y a une très nette différence entre le rôle et la fonction du Patriarche Byzantin et la tradition canonique à cette même époque.
Du point de vue canonique, le Patriarche de Constantinople demeurait le primat de l’Église d’Orient, bien que cette primauté lui fût accordée parce que sa ville était celle de “l’empereur et du sénat” (Canon 28 de Chalcédoine), ainsi que le primat de son propre “diocèse”.
Du point de vue “impérial par contre, il devenait le chef de l’Église, centre non seulement de l’unité de l’Église mais aussi de son gouvernement « juridictionnel ».
Les évêques locaux, à l’instar des gouverneurs civils, se sont transformés peu à peu en représentants, voire délégués, d’un pouvoir central, c’est-à dire du Patriarche et de son Synode permanent.
La troisième strate : l’Église nationale
La conquête des provinces byzantines par les Arabes, les Turcs, l’invasion latine de 1204, le défi des Slaves, au Nord, etc.… font qu’en pratique Byzance devient un État grec, relativement petit et faible. Les nations entrées dans sa zone d’influence politique, religieuse et culturelle (Bulgares, Serbes et, plus tard, Russes) nées de la vision byzantine, se mettent à s’approprier sa vision théocratique.
C’est à partir de ce constat qu’apparait l’idée d’autocéphalie -l’indépendance ecclésiale- comme fondement de l’indépendance nationale et politique.
L’IDEE ISLAMIQUE/ LA NATION-RELIGION (MILLET)
« Malgré la chute de Byzance en 1453, l’idée islamique de la “nation-religion” (Milet) a garanti pour tout le monde byzantin, soumis à cette époque à la domination turque, la continuation de la tradition “impériale”.
Selon la logique du système Milet, le Patriarche œcuménique a assumé, non seulement de facto mais aussi de jure, le rôle de chef de tous les chrétiens ; il est devenu en quelque sorte leur empereur.
La période qui suit (fin XV°s – XIX°s) est pour l’Orthodoxie, à quelques exceptions près, une période de divisions, de sclérose théologique et, de nationalisme ecclésial complètement sécularisé.
LA SITUATION EN AMERIQUE
Il était naturel aussi que l’explosion ait lieu en Amérique.
Tant que les Églises orthodoxes restaient isolées les unes par rapport aux autres, chacune vivant dans son propre “monde”, il était peu probable qu’une crise ouverte éclate. Ce qui se passait dans une Église donnée n’intéressait guère les autres.
En Amérique, le principe national qui veut que « chaque Russe, Grec, Serbe ou Roumain fait partie de son Église d’origine où qu’il se trouve dans le monde, et chaque Église nationale possède ipso facto des droits canoniques partout. » a produit un effet inattendu : on a vu fleurir des Eglises en exil, et des diocèses avec évêques et territoire canonique.
HELLENISME CHRETIEN OU HELENISME GRECO-PAÏEN ?
« Presque toutes les Églises orthodoxes sont, à des degrés divers, victimes d’un nationalisme hypertrophié et se réfèrent exclusivement au “précédent” national dans l’histoire de l’Église.
Par contre, le moment de vérité qui vient de sonner concerne aussi la couche que nous avons appelée impériale. C’est ici que nous trouvons la racine profonde de la réaction spécifiquement grecque face à la tempête contemporaine. »
Si, pour la majorité des Orthodoxes, le centre de leur mentalité ecclésiale est national, le nationalisme de la mentalité grecque n’est pas univoque. Les racines du nationalisme grec ne se trouvent pas, comme pour les autres Orthodoxes, dans la réalité et l’expérience de l’Église-nation, mais dans l’oikouméné byzantin, c’est-à-dire dans la couche du passé que nous avons nommée impériale.
Par nature, la pensée orthodoxe grecque se réfère à la typologie byzantine i.e. « la transformation presque inconsciente de la couche “impériale” de la tradition orthodoxe en une couche essentielle, c’est-à-dire la transformation de Byzance en une dimension permanente, essentielle et normative pour l’Orthodoxie elle-même. »
« Les Byzantins s’appelaient romains, non pas grecs, parce que Rome, et non pas la Grèce, était symbole d’universalité. La nouvelle capitale ne pouvait qu’être la Nouvelle Rome. Jusqu’au VIIe siècle, le latin, non pas le grec, était la langue officielle des chancelleries byzantines. Les Pères de l’Église auraient été horrifiés de se faire appeler Grecs. »
LE RÔLE DU PATRIARCHE OECUMENIQUE
« La première difficulté vient des façons différentes de comprendre la place et de la fonction du Patriarche œcuménique dans l’Eglise orthodoxe. Toutes les Églises orthodoxes, sans exception, lui accordent la primauté, mais entre les Églises grecques et les autres il existe des différences substantielles dans la compréhension de cette primauté. »
Pour les Églises non grecques, le rôle du Patriarche œcuménique est enraciné dans l’ecclésiologie essentielle qui, dès le début, a toujours connu un centre universel reconnu par tous ce qui en fait un centre d’unité
Cet ordre des choses n’est pas immuable et peut être modifié par un concile [3]
Cette interprétation, pourtant, est “anathème” pour les Grecs qui se réfèrent à une vision du trône œcuménique avant tout spirituelle et psychologique plus qu’ecclésiologique et canonique. L’expression « Constantinople est le siège qui possède la primauté universelle que l’Église lui a accordée » s’est transformée en « Constantinople doit être le siège… »
Le P. Schemann après une longue analyse historique en arrive à cette compréhension de la manière « grecque » de considérer l’autocéphalie : « Par conséquent, même aujourd’hui, les hiérarques grecs ne comprennent guère le principe d’autocéphalie, qui constitue le fondement de l’organisation actuelle de l’Église. Ils ne le comprennent ni dans son principium, c’est-à-dire le droit d’accorder l’autocéphalie, ni dans sa modalité, c’est-à-dire dans ses implications pour les relations entre les Églises. »
Et conclut par un état des lieux en 1971 :
« Jusqu’à présent, de par sa situation spécifique, une seule “partie” de l’Église orthodoxe implantée en Amérique (celle qui s’appelait communément, avant 1970, « Métropolie russe », puis « Église Orthodoxe en Amérique ») s’est vue “forcée” à retourner aux sources. [4]
Tôt ou tard, on comprendra que ce n’est pas conforter l’Orthodoxie que de chercher à préserver l’hellénisme “ethnico-linguistique”, la “russité”, la “serbité”, etc. Par contre, en mettant en pratique les exigences essentielles de l’Église, nous sauverons tout ce qui est essentiel dans chaque forme de la foi et de la vie chrétiennes.
Le Père G. Florovsky, théologien russe vivant et travaillant en exil, avait eu le courage, dans son livre Les voies de la théologie russe, de dénoncer et de condamner les déviations de la “russité” par rapport à l’hellénisme chrétien. Il a ainsi libéré toute une génération de théologiens russes des derniers complexes du pseudo-messianisme et du nationalisme religieux. Le moment n’est-il pas venu qu’un théologien grec accomplisse la même tâche, difficile certes, mais nécessaire, pour libérer l’esprit grec des ambiguïtés de l’hellénisme “ethnico-linguistique” ?
Tôt ou tard, il apparaîtra évident à tous que le Patriarche œcuménique, s’il veut exercer la primauté universelle, n’y arrivera pas par des réactions défensives et négatives, ni par un appel douteux à des traditions et à des précédents également douteux et inapplicables. Il y parviendra plutôt en montrant positivement le chemin vers la réalisation de la nature essentielle de l’Église “en tout lieu de son empire”. »
[1] SCHMEMANN Alexandre. Une tempête significative. Un document retrouvé. ( Traduction française du Père Stéphane Bigham de l’article « A Meaning-full Storm », Church, World, Mission : Reflections on Orthodoxy in the West, Crestwood, NY, St. Vladimir’s Seminary Press, 1979, pp. 85-116. En russe in Tserkov, mir, missia: mysli o Pravoslavii na Zapade, Sviato-Tikhonovskij – Institut, Moscou 1996).
[3] Par exemple, si l’Église Catholique romaine s’unissait à l’Orthodoxie, la primauté universelle pourrait (ou pourrait ne pas) revenir à l’Ancienne Rome. Telle est la position ecclésiologique, dans sa forme la plus simple, des Eglises non grecques.
[4] Une étude de mars 2002 souligne la multiplicité des juridictions, qui rend le paysage orthodoxe américain extrêmement complexe : plus de 20 principales juridictions orthodoxes, réparties en 50 diocèses. En raison de leurs liens étroits avec les Églises-mères, auxquelles elles restaient liées, les communautés orthodoxes sur sol américain ont été directement affectées par les développements dans leurs pays d’origine. (MAYER, Jean-François. Religioscope. Eglises orthodoxes aux Etats-Unis : une identité en mutation. 11 mars 2002 [consulté 16 mai 2020] disponible sur le web : https://www.religion.info/2002/03/11/eglises-orthodoxes-aux-etats-unis-une-identite-en-mutation/
Christine Pedotti s’adresse aux responsables de l’église catholique et les interpelle en profondeur en ramenant sans cesse leurs actes, comportements et enseignements aux paroles et aux agissements du Christ dans les évangiles en 130 pages et dix petits chapitres :
1.De la crise ; 2.De la sexualité ; 3.Du péché et du crime ; 4.Du père et de la mère ; 5.Du pouvoir ; 6.Du scandale ; 7.De l’exemplarité ; 8.De l’urgence ; 9.Du catholicisme ; 10.De l’avenir
Auxquels elle joint trois annexes : 1.Lettre du pape François au peuple de Dieu ; 2.Les principales étapes du dévoilement de la pédocriminalité et de sa dissimulation dans l’Église catholique ; 3.Les causes de la pédophilie des prêtres.
Au-delà du ton incisif, voire polémique, les analyses sont, hélas, pertinentes ! Les questions sont de vraies questions que l’Eglise Catholique doit impérativement affronter et solutionner. La faillite de notre système catholique romain appelle un renouvellement total de la manière de penser et de vivre l’Eglise, sous peine de sclérose et/ou de disparition.
Il est remarquable que le catholicisme se développe le plus dans la société les moins instruites. Cela devrait poser question. Non sur la validité du message, mais sur la manière dont l’Eglise Catholique Romaine -et pas seulement elle- propose de le vivre concrètement ad intra comme ad extra.
(Voir en complément un article du Bulettin Théologique n° 13 du Centre Théologique Universitaire de Rouen
Christine Pedotti est écrivain, éditrice et journaliste catholique. Licenciée en histoire et diplômée de Sciences PO, licenciée en théologie à l’institut catholique de Paris, elle entre à Bayard presse où elle écrit pour Grain de soleil. Elle fonde Enfance Chrétienne, née de la fusion des éditions Mâme et Fleurus. Elle est la cheville ouvrière des encyclopédies Théo. Elle est rédactrice en chef de Témoignage chrétien et a coordonné la rédaction de « Jésus. L’encyclopédie » publiée sous la direction de Joseph Doré chez Albin Michel en 2017.
François Dvornick: Byzance et la primauté Romaine
L’Auteur
František (François) Dvornik, Tchécoslovaque, Prêtre, spécialiste des histoires byzantine et slave.
Docteur ès Lettres (Paris Sorbonne 1926), professeur d’histoire ecclésiastique à la faculté de théologie catholique de Prague (1928), il est l’un des fondateurs de l’Institut d’études slaves de Prague et cofondateur de la revue scientifique Byzantinoslavica.
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, il enseigne au Collège de France et à l’École des hautes études en sciences sociales à Paris.
De 1948 à 1965, il est professeur d’études byzantines au Dumbarton Oaks Center à l’université Harvard.
Il est nommé consultant pour l’histoire de l’œcuménisme au Concile Vatican II à partir de 1961.
F. Dvornik compte parmi les plus fameux byzantologues du monde. Son travail sur le patriarche Photius Ier de Constantinople fait référence.
“Byzance et la primauté romaine“
La primauté romaine reste le principal obstacle au rapprochement entre l’Eglise Catholique et l’Eglise Orthodoxe. La division politique, les querelles théologiques exacerbées, les questions ecclésiologiques sans doute plus profondes vont conduire à des positions qui se rapprocheront avant de diverger, après 1204, dans des polémiques plus politiques que religieuses (Introduction)
Tant que le siège du pouvoir impérial est à Rome, la primauté de siège apostolique romain ne fait pas débat. Le “principe d’accommodement” à la division politique de l’empire est une réalité depuis les apôtres eux-mêmes (Chap.1). Mais à partir du transfert de la capitale de Rome à Constantinople (330) les différences de vécu vont avoir des effets polémiques sur les rapports entre l’Eglise de Rome et l’Eglise de Constantinople. C’est à cette période (IV°s) que va être affirmée l’origine pétrinienne du siège romain, en attribuant au fondateur le rôle de “premier évêque” -ce qui est abusif.
Dans l’Orient, ce “principe d’apostolicité” sera aussi l’utilisé, en réaction à son utilisation continue par Rome dans ses efforts pour lui imposer sa suprématie .
Les peurs et les incompréhensions -et même les procès d’intention- font que le synode de Constantinople en 381 et surtout le canon XXVIII du concile de Chalcédoine[1] en 451 sont vivement questionnés par Rome comme dangereux pour l’unité de l’Eglise et la primauté du siège romain (Chap.2)
Le schisme d’Accace (484-519) (chap.3) qui parraine un compromis avec les monophysites (Hénoticon) va provoquer chez le Pape Gélase une réaction très vive : non seulement il refuse de reconnaitre le canon XXVIII de Chalcédoine, mais il affirme la juridiction de Rome sur toute l’Eglise, ce qui est parfaitement inacceptable pour Constantinople qui veut bien reconnaitre la primauté de Rome, mais entend conserver son autonomie. Le Pape Hormisdas et l’Empereur Justinien vont débloquer la situation en publiant le “libellus Homisdae” ou l’Eglise de Rome est reconnue comme: le “Siège apostolique, [où] la religion catholique a toujours été immaculée” et où “persiste la totale et la vraie force de la religion chrétienne“
L’empereur Justinien qui est le grand artisan de cette nouvelle entente souhaite une réharmonisation de l’Empire entre Rome et Constantinople en plaçant quasiment à égalité comme don divin “sacerdotium et impérium”. Mais les invasions et la perte de la domination maritime vont mettre à mal l’œuvre de Justinien, provoquer une rupture dans les communications de tous ordres. Les idées, les intérêts divergent : Constantinople, confrontée à l’envahisseur Perse et Arabe, se recentre sur sa culture hellénistique et orientale, alors que l’occident confronté aux Germains va tenter de les christianiser mais aussi va intégrer une partie de leurs traditions. (Chap.4)
Les crises des VII° et VIII°s (chap.5): monothélisme -avec comme conséquences l’arrestation du Pape par l’Empereur et sa mort en exil- synode ‘in trullo” (692), dont certains aspect sont refusés par l’Eglise de Rome[2]; confirment un éloignement progressif des conceptions de la discipline de l’Eglise. Si la conclusion de la crise iconoclaste permet au Pape de réaffirmer la primauté romaine, sa lettre qui est lue au concile Nicée II (787) est soigneusement censurée de tout ce qui est revendication romaine de primauté juridique.
L’acceptation du principe d’apostolicité par les Eglises d’Orient va conduire à un renouveau de l’idée Pentarchique[3] au VIII° et IX°s (Chap.6), ce qui n’impliquait pas une revendication d’égalité des Sièges et ne remettait pas en cause la primauté romaine. Même au cours du conflit qui l’oppose à Rome, le Patriarche Photius ne remet pas en cause la primauté romaine, au contraire.
La crise, -les crises- du XI°s (chap.7) vont mettre à mal une entente doctrinale orient-occident si difficilement réalisée. Avec l’avènement d’un pouvoir germanique fort en occident, les “grecs” sont perçus comme des étrangers, alors que Byzance conserve l’idée d’une unité de l’Empire Romain qui, de fait, n’existe plus. Ce déséquilibre encore masqué va se révéler au grand jour avec les conquêtes par les Normands des territoires byzantins d’Italie (X° et XI°s). Ensuite tout est bon à querelle: différences d’usage, de discipline ecclésiastique, de théologie. Même les tentatives d’alliance contre les Normands tournent à la querelle. La bulle d’excommunication contre le Patriarche de Constantinople (1054) n’est que la conséquence d’une impossibilité de se comprendre.
La prise de Constantinople par les armées de la 4eme croisade (chap.8) et la création d’un empire latin avec un patriarche latin à la tête de l’Eglise grecque, va conduire les “grecs” sur une position défensive qui deviendra une opposition totale et mettra fin à toute possibilité d’entente.
Conclusion
C’est en vertu du principe d’accommodement que Byzance va réclamer une place particulière. Rome va s’efforcer de remplacer, dans l’organisation de l’église, le principe d’accommodement par le principe d’apostolicité. Le fait que l’Eglise Byzantine impressionnée par cette référence à un Apôtre-Fondateur adopte aussi peu à peu ce même principe provoque -me semble-t-il- une distorsion de compréhension de ce qu’est l’ Eglise en Occident et en Orient, parce que les définitions de l’Eglise ne sont pas les mêmes.
Le périmètre des patriarcats orientaux est à l’échelle d’un diocèse, alors que Rome, qui ne se reconnait pas comme un patriarcat mais comme le Principe d’Unité de l’Eglise, se pense à l’échelle du monde. Les conflits qui s’ensuivent seront des conflits de juridiction plus que des conflits théologiques, Rome étant au contraire reconnue comme gardienne de la foi, au moins jusqu’à ce que François Dvornik intitule très justement “La catastrophe de 1204”.
Byzance et la primauté romaine est un livre-bilan des dernières recherches de l’auteur sur “l’organisation de l’Eglise primitive et les idées qui sanctionnaient cette organisation”[4]. L’idée de primauté dans l’église byzantine est présentée dans un cadre nouveau: plutôt que d’aborder cette question de façon théologiquement antagoniste, c’est en faisant un travail d’historien[5], en examinant les positions de l’Eglise byzantine et de l’Eglise romaine telle que les textes de l’époque les font connaitre, et à partir du point de vue des Byzantins, que F. Dvornik fait apparaitre une nouvelle manière de considérer ce problème.
Il y a peu de recensions sur cet ouvrage (en général en anglais), mais il est intéressant de noter que sur les deux trouvées[6] celle de Vassil T Istavridis historien orthodoxe, se termine sur ce remerciement: “Le lecteur Orthodoxe est très reconnaissant de l’application de cette méthode dans l’étude présente, de l’objectivité avec laquelle l’auteur traite son matériel dans la relation tant à l’Est que l’Ouest, et comme Orthodoxe, exprime l’espoir de voir plus d’études de la même sorte émanant d’études théologiques et historiques Occidentales.”
[3] Formulée par Justinien (Novelle 123, VI°s) et énoncée explicitement dans les actes du synode ‘in trullo”.
[4] Le schisme de Photius : histoire et légende, Paris, éd. du Cerf, coll. « Unam Sanctam », no 19, 1950; The Slavs : their early history and civilization, Boston, American Academy of Arts and Sciences, 1956; The idea of apostolicity in Byzantium and the legend of the apostle Andrew, Cambridge, MA, Harvard University Press, 1958
[5] Francis Dvornik, Byzance et la Primauté romaine, article paru dans The American Ecclesiastical Review: pp 289-312, éd. The Catholic University of America Press, 05/1961
[6] Cyril Mango: Journal of theological studies, 01/01/1966, Volume : 17, Page : 202; et Vasil T. Istavridis: The Greek Orthodox theological review, 01.07.1965, Volume : 11, Numéro : 1
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Lettre à ma belle fille catholique pour lui expliquer le
protestantisme
Antoine Nouis
Antoine Nouis a été durant plus de vingt ans pasteur de l’église réformée de France. Auteur de plusieurs livres sur la spiritualité et la pensée protestante, il est aujourd’hui journaliste à l’hebdomadaire réforme.
“Dans ce beau texte sous forme d’adresse à sa belle-fille, il propose de dévoiler les spécificités de la foi protestante, et ce qui la différencie du catholicisme. Il retrace à la fois les principes, l’implantation puis l’histoire du protestantisme en France et son importance, souvent méconnue. Il montre également l’actualité et la pertinence de la foi protestante, ses points de convergence et parfois de divergence avec la foi catholique, et comment les deux traditions peuvent se nourrir l’une de l’autre.”
C’est un petit livre (106 pages de texte) que tous les catholiques français devraient lire. C’est non seulement intelligent, mais c’est chaleureux, clair, et profondément imprégné d’affection pour l’église catholique sans renier en rien sa manière protestante d’exprimer sa foi.
C’est aussi une vraie leçon d’œcuménisme qui cherche dans l’autre le supplément de richesse et non le “defectus” supposé.
Dans cette année de la miséricorde ouverte par le pape François, il est bon de se retourner vers ce texte un peu ancien, certes, mais qui garde, outre son actualité,toute sa pertinence.
La miséricorde s’y exprime comme “le rapport de la justice avec l’amour”(n°5) “la fidélité du père à sois-même est totalement centrée sur l’humanité du fils perdu, sa dignité” (n°6)
La miséricorde comme Amour qui pardonne et restaure trouve son sommet et son accom!plissement dans la passion, la résurection et l’ascension de Jésus-Christ.
A relire -ou lire- de toute urgence
Jean-Paul II: La miséricorde divine, Centurion Paris 1981
Comprendre les enjeux du prochain concile de l’Eglise orthodoxe
Dans la ligne du colloque de l’ACONor : “Découverte et actualité des Eglises Orthodoxes: unité et diversité” qui s’est tenu à Caen du 15 au 17 novembre dernier, je vous propose ce numéro 243 de la revue “Contacts: revue française de l’orthodoxie ” qui reprends les actes du colloque du 18 au 20 octobre 2012 organisé au Collège des Bernardins à Paris par l’ Institut de théologie orthodoxe St Serge à Paris et le Centre œcuménique de l’Université catholique de Leuwen en Belgique.
Bien que vieux de deux ans déjà il comporte un double intérêt: éclairer les problématiques de ce prochain Grand et Saint Concile Panorthodoxe tant par des théologiens orthodoxes que par des apports de théologiens catholiques.
Un chapitre particulièrement intéressant est celui sur les relations œcuméniques des Eglises orthodoxes. Il met le doigt sur deux points particulièrement importants: le fait que les accords signés par “l’Eglise Orthodoxe” ne sont pas forcément reçus par les Eglises Orthodoxes dans leur diversité; et le second par le fait que -de même que l’Eglise Catholique pour elle-même- les Orthodoxes assimilent facilement l’Eglise à l’Eglise Orthodoxe. (Nature et mission de l’Eglise (2005). Je vois bien par l’expérience -en tant que catholique romain, les Eglises de la réforme n’ayant pas cette position totalitaire- combien il est nous est difficile de regarder « autrement » la réalité de ce qu’est l’Eglise. Et pourtant nous ne pourrons en faire l’économie si nous voulons exprimer l’ Eglise du Christ autrement que par une théologie -implicite ou explicite- du retour à la « vraie » Eglise (qui ne saurait être que la nôtre bien sûr !)
Geo
Pour se procurer la revue suivre le lien: Contacts
Bernard Sesboüé sj
Pour une théologie oecuménique
Coll: Cogitatio Fidei
ed du Cerf, Paris 1990
Il y a des livres qui sonnent comme des évidences. Ce fut le cas pour moi avec le livre du Pasteur Birmelé ” l’horizon de la grâce ” et il en est de même avec ce livre de Bernars Sesboüé s.j. Théologiens réputés l’un et l’autre dans leurs Eglises respectives on sent le même souffle, le même appel, la même certitude: ce chrétien d’une autre Eglise qui est mon frère, Dieu me donne d’abord à l’aimer, ensuite à le comprendre et enfin à chercher ce qui nous met en chemin, l’un avec l’autre, vers le Seigneur: non pas tant pour chercher à établir une vérité qui nous est commune, que pour recevoir notre vérité et notre unité de celui qui, seul, est la Voie, la Vérité, et la Vie.
Ce livre est le fruit d’un engagement de plus de trente ans au Groupe des Dombes et dans diverses commissions officielles de dialogue œcuménique en France et au plan international.
Le Père Sesboüé termine son livre sur cette invitation à tout chrétien, qu’il soit catholique ou non, à avancer sur les voies de l’Unité: “Changer, c’est le terme même de la conversion dans le NT : « Convertissez-vous et croyez à l’Évangile » (Mc 1,15), c’est-à-dire : changez votre cœur. Oui, la dynamique œcuménique est une dynamique de conversion: elle nous change et elle doit encore nous changer pour nous réconcilier complètement. Plus elle progressera, plus elle rendra possible la conversion des mentalités, des institutions ou des « structures », toutes cristallisations objectives de nos libertés.
C’est par là que passe le patient cheminement de la réconciliation du peuple de Dieu dans une conversion commune à l’Évangile.”
“Ces divers écrits, d’époques différentes, abordent les points les plus fondamentaux de la recherche oecuméniques de ces dernières années. Il veut être une contribution catholique à la pleine communion entre les Églises.” (4° de couverture)
Depuis 1990 des choses ont changé évolué, mais le mouvement reste le même.
Ce livre est trouvable en ligne.
L’ Atlas des religions
publié par La Vie et Le Monde est devenu un classique, traduit et diffusé jusqu’ en Amérique latine et réédité en librairie. Il reste, à ce jour, la seule publication offrant une vision approfondie du paysage religieux mondial, à la fois à travers l’histoire,donc sur le temps long, et dans ses composantes les plus contemporaines. Il propose en effet une approche synthétique de l’ensemble
des grandes religions, mais aussi une analyse détaillée, pays par pays, fruit de la collaboration des deux rédactions de La Vie et du Monde et de l’apport des plus éminents universitaires.
Les cartes et graphiques sont remarquables Cette publication non seulement nous ouvre sur les réalités des autres religions mais elle permet de les ,mettre en perspective dans notre pays, en Europe et dans le monde.
Un “outil” de référence pour, non seulement, ne pas dire n’importe quoi, mais -plus important- pour ne pas penser n’importe comment…
12€ dans toutes les bonnes librairies.
Pas cher pour ne pas mourir idiot!
Geo
L’Église – Vers une vision commune
Conseil œcuménique des Églises :
Document du Foi et Constitution n° 214
Publié avec Unité Chrétienne par la Fédération Protestante de France,ISBN 979-10-94234-00-6, 76 pages, prix : 6,50 €
Ce second texte de Foi et constitution fait suite au premier : Baptême, Eucharistie, Ministère (1982) – et aux réactions officielles à ce document – qui a cerné des domaines clefs de l’ecclésiologie dans lesquels les études devaient se poursuivre ; il fait également suite aux questions ecclésiologiques soulevées dans le document d’étude : Un seul baptême – Vers la reconnaissance mutuelle (2011).
Pendant vingt ans, les représentants délégués des Églises orthodoxes, protestantes, anglicanes, évangéliques, pentecôtistes et catholique romaine ont tenté de dégager une vision globale, multilatérale et œcuménique de la nature, du but et de la mission de l’Église.
Les Églises ont fait part de leurs réactions et critiques constructives aux deux premières ébauches d’une déclaration commune.
La Commission de Foi et constitution répond à ces Églises par le présent document.
Ce texte dont certaines parties datent de vingt ans est déjà, dans certains cas, dépassé par les accords bilatéraux. Il a fallu ce temps pour que les Eglises Orthodoxes, pour des raisons souvent autres que théologiques, puissent donner leur signature et un accord à la publication.
On reproche parfois aux Eglises et communautés cclésiales (pour reprendre la distinction de Vatican II) de ne pas s’engager assez résolument dans la recherche véritable de l’unité, on déplore des piétinements, des avancées potentielles qui ne voient pas le jour encore… C’est ne pas mesurer vraiment combien, en 50 ans, un grand chemin a été parcouru -théologiquement c’est indéniable- mais également dans la connaissance, le respect et l’amour des frères et sœurs d’autres Eglises. A tel point que le danger qui nous guette aujourd’hui est celui de se contenter finalement d’une coexistence pacifique entre nos Eglises et ne plus voir les enjeux de rechercher et d’accueillir dans l’Esprit Saint une réelle unité visible.
En 50 ans les avancées sont en fait énormes. En témoigne ce texte de convergence de Foi et Constitution. Un texte important et fort, stimulant, qui fait le point sur les questions ecclésiologiques qui se posent à nos Eglises, quant à sa nature et sa mission, quant aux sacrements et aux ministères.
On mesure dans ces pages combien il y a aujourd’hui de convergences dans nos compréhension de ce qu’est l’Eglise et sa mission. Les divergences ne sont pas éludées et sont bien présentées, comme les questions qui restent livrées aux différentes Eglises dans cette quête de l’unité à laquelle nous sommes appelés et qui est ici qualifiée et rappelée comme étant une urgence (au regard des appels du Christ lui-même en Jn 17 et au regard aussi du scandale que représente nos divisions.
Concrètement, après une introduction qui explique comment on en arrive aujourd’hui à ce texte, quatre chapitres nous aident à entrer dans les diverses réalités de ce qu’est l’Eglise et ce que Dieu attend d’elle :
1. La mission de Dieu et l’unité de l’Eglise (envisagée dans le dessein de Dieu, dans ses perspectives historiques et dans l’appel à l’unité)
2. L’Eglise du Dieu Trine (l’Eglise comme communion, l’Eglise aussi comme signe et servante du dessein de Dieu pour le monde, avec la question d l’unité dans la diversité)
3. L’Eglise – croître en communion (il y est question de la foi, des sacrements et des ministères)
4. L’Eglise – Dans et pour le monde.Ce texte a été le sujet de la session oecuménique de la Communauté du Chemin Neuf et est l’objet de l’étude de la Commission Théologique de l’ ACONor
on peut le commander (6,5€) aupres de: “Unité Chrétienne, 7 place Saint Irénée, 69005 Lyon” ou par mail: secretariat@unitechretienne.org
Istina 014-2/3 : DU CŒUR DE L’HOMME AU CORPS DE L’ÉGLISE : LE BAPTÊME DANS L’ESPRIT SAINT
Colloque organisé par la communauté du Chemin Neuf
du 7 au 10 mars 2013 sous la présidence de
Mgr Justin Welby, Archevêque de Canterbury, Primat de la Communion Anglicane, et de Mgr Philippe Ballot archevêque de Chambéry.
I. Jalons historiques et problématiques
avec les contributions de : L. Fabre, M. Healy, C. M. Robeck,
G. Tchonang, N. Blough, P. Hocken, A. Birmelé, É. Vetö
II. Expérience individuelle et ecclésiale de l’Esprit
avec les contributions de : C. Grappe, É. Vetö, M. Stavrou,
F. Lestang, A. Birmelé, J. Famerée, C. M. Robeck
III. Baptême dans l’Esprit Saint et vie de l’Église
avec les contributions de : P. Dockwiller & M. Healy
Cette expérience fondamentale du renouveau charismatique qu’est le Baptême dans l’ Esprit-Saint est ici étudié loin des agitations partisanes, mais de façon historique, scripturaire et théologique.
J’ai particulièrement apprécié l’article de Philippe Dockwiller: “Unicité de la grâce baptismale: l’Esprit-Saint est la force de ce dont le Baptême est la forme” (pp 283-295)
Il n’en reste pas moins que les expressions Baptême dans l’ Esprit-Saint et effusion de l’Esprit-Saint restent deux termes accolés à une même réalité, même si le terme “baptême” doit être préféré -et tant pis pour les prélats qui trouvent que ça voudrait dire que les catholiques vivent la même chose que les “protestant” (p 119)
Ben oui ! C’est mal ?
Je préférerai qu’ on distingue les deux expériences de façon fondamentale:
– d’une part l’ effusion de l’ Esprit-Saint: don gratuit et inattendu de Dieu qui vient nous envahir par grâce, sans volonté de notre part (st Paul sur le chemin de Damas)
– d’autre part le baptême dans l’Esprit-Saint: don de Dieu reçu à travers la prière des frères réunis en Eglise et qui a pour préalable la volonté de reçevoir le Christ comme mon sauveur et lui remettre ma vie, et pour conséquence la mission (voir l’article de A. Birmelé: Baptême dans l’Esprit-Saint et Eglise. pp 247-257)
Ce numéro d’ Istina est un éclairage bienvenu pour faire entrer dans notre intelligence ce que, dans le renouveau, nous vivons par grâce.
Depuis presque 20 ans, le Centre Théologique Universitaire de Rouen accompagne les chrétiens normands désireux de se former en théologie.
Au long d’un parcours universitaire destiné à obtenir la licence de théologie en partenariat avec l’Institut Catholique de Paris, les étudiants s’immergent dans le vaste monde de la théologie et de l’exégèse.
De bien des façons, même si un diplôme ne fait pas tout, les fruits de ces formations poussent ici et là.
L’arrivée de ce bulletin en est un assurément.
Projet ambitieux qui consiste à rendre compte de l’actualité de la théologie dans notre région.
Projet modeste puisqu’il entend ne pas se substituer aux revues déjà établies.
Avec des articles, des recensions d’ouvrages, les conférences, le bulletin entend donner un écho de ce qui se vit en Haute-Normandie au sujet de la théologie.
La tenue d’un bulletin est une activité exigeante et passionnante.
Exigeante car il faut tenir les délais, accompagner les articles, relancer les auteurs, veiller aux détails de l’édition (même sur le web).
Passionnante car elle demande une attention constante « aux signes des temps », à la façon dont nos sociétés réfléchissent et sollicitent les capacités de réflexion des disciples du Christ.
Puisse ce bulletin contribuer à la réflexion et témoigner combien aussi en théologie, l’Eglise, suivant la formule de Paul VI, veut se faire conversation avec le monde.
Père Jean-Baptiste SEBE
Directeur du CTU
L’HORIZON DE LA GRACE
André Birmelé
Ed. Olivétan/le Cerf Paris 2013 « Partant du témoignage biblique et revisitant les grands moments de l’histoire du christianisme, André Birmelé en présente les orientations majeures. La Révélation, la Parole de Dieu, la foi, le péché, Jésus-Christ, sa Croix et sa Résurrection, le Salut par la grâce, les Sacrements, l’Église… Les convictions chrétiennes fondamentales sont examinées tour à tour, présentées sans simplification mais dans un langage accessible, volontairement dégagé du détail des débats scientifiques.
L’auteur montre aussi que maints sujets qui ont provoqué des divisions entre les Églises sont à présent le lieu d’une profession de foi commune, le fondement d’une diversité réconciliée… »
Cet exposé de la foi chrétienne telle qu’elle est comprise par la théologie luthérienne est toujours ouverte sur les compréhensions différentes des autres Eglises. Et c’est là pour le catholique que je suis une des très grandes richesses de ce livre. Il nous fait entrer dans une compréhension différenciée entre les interprétations qui ne sont plus vraiment séparatrices pour nos Eglises et celles qui le sont encore, et qui trouvent leur source non pas dans la compréhension de l’Eglise comme instrument du salut, mais dans la nature de cette instrumentalité.
Le bon sens populaire affirme que « qui n’entends qu’une cloche n’entend qu’un son ! » Voilà une excellente manière, pour ceux d’entre nous qui ne sont pas Protestants, d’entendre « un autre son de cloche » donné avec intelligence, brio, et respect par un grand théologien.
Je ne dirai pas comme dans Charlie hebdo « si vous ne pouvez pas l’acheter volez-le » mais c’est évidemment un livre à lire et à faire lire.
Geo
On parle de façon indifférenciée de l’Unité…mais de quelle unité parle-t-on ?
L’œcuménisme est la recherche de l’unité des chrétiens. Les dialogues entre les Eglises sont un des moyens de cette unité mais est-ce le seul ? L’unité des chrétiens n’est pas nécessairement l’unité des Eglises. Certes la recherche de consensus de plus en plus fins est non seulement souhaitable et nécessaire[1] mais ne résume pas tout.
Je pense même que la diversité de nos Eglises (à condition que ce soit une diversité réconciliée) est une vraie chance et une vraie richesse que nous avons encore à découvrir. C’est sur ce modèle[2] qu’a été créé la Communion des Eglises Protestantes en Europe (CEPE)[3] au sein du protestantisme.
Il faut bien reconnaître que c’est d’une démarche plus pesante que l’Eglise Catholique avance sur ce chemin. Mais elle avance… tirée par le Pape François qui pose des gestes nécessaires que certains trouvent sans doute (trop) audacieux…et qui sont parfois ambigus[4]
Il serait sans doute bon de se souvenir que la bataille autour de termes controversés de Vatican II (comme le fameux « subsistit in ») qui ont été interprété à postériori par certains théologiens conservateurs (comme le deviendra le Cardinal Ratzinger en tant que préfet de la congrégation pour la doctrine de la foi et en tant que Pape Benoit XVI), sont affirmés dans leur sens le plus restrictif[5], en trahison complète de la volonté des Pères conciliaires[6] et de l’explication beaucoup plus nuancée de Jean-Paul II dans l’encyclique « Ut unum sint »[7]
Si « en l’Eglise Catholique subsiste l’unique Eglise du Christ », c’est clairement indiquer qu’elle n’est pas la seule, même si elle l’est parfaitement. Les Eglises orthodoxes et les Eglises d’Orient sont, elles aussi, des Eglises originelles. Et les différentes Eglises issues de réformes depuis le XVI° siècle enseignent la foi reçue des Apôtres. Et même parfois de façon plus radicale que nos « vieilles » Eglises.
Il reste un pas essentiel à faire pour l’Eglise Catholique : cesser de se croire au fond la « seule » Eglise véritable, et sans renier le magistère d’unité du pape tel qu’il a été vécu dans les premiers siècles chrétiens, admettre qu’elle est une confession de la foi chrétienne éminente certes, mais pas la seule.
On ne peut pas faire l’unité avec des frères que l’on traite comme des inférieurs accablés de soi-disantes « déficiences » mais bien avec des pairs, des égaux.
C’est une même foi qui nous unit : être chrétien c’est -au minimum- se référer à l’auto-révélation de Dieu en et par Jésus-Christ, mort et ressuscité, retourné vers le Père, à sa médiation exclusive pour le salut, et au fait qu’il se communique à nous par sa Parole dans la bible et les sacrements du baptême et du repas du Seigneur (qu’on l’appelle Divine Liturgie, Eucharistie, ou Sainte Cène) au moins.
Evangélisation / baptême et repas du Seigneur sont ce qui nous « fait » fondamentalement chrétien.
« Nous avons été tous baptisés dans un seul esprit et dans un seul corps. Juifs ou Grecs, esclaves ou hommes libres, et nous avons été abreuvés d’un seul Esprit » (1Cor. 12,13)
Après la résurrection les Ecritures montrent Jésus qui envoie ses disciples en mission pour enseigner et baptiser. Et des avancées importantes de compréhension partagée ont été réalisée à la conférence du Conseil Œcuménique des Eglises en 1982 à Lima par le document BEM (Baptême, Eucharistie, Ministère) de « Foi et Constitution »[8]
Pratiquement toutes les Églises chrétiennes reconnaissent la valeur et la validité du baptême des autres Églises grâce à de nombreuses et fructueuses discussions œcuméniques. La reconnaissance mutuelle est établie notamment entre l’Église catholique, l’Église anglicane et les Églises luthéro-réformées et méthodiste.
Par contre la situation est plus complexe avec les Baptistes qui ne reconnaissent pas le baptême des petits enfants[9]. Cependant dans la pratique des accords locaux existent comme en Suisse [10] et le dialogue progresse[11]
Pareillement, pour le Repas du Seigneur. La notion de « présence réelle[12] » mérite mieux que les idées toutes faites et répétées à l’envi.
Quelle compréhension chaque Eglise a de la présence du Seigneur dans la célébration liturgique de la Divine Liturgie, Eucharistie, ou Sainte Cène ? Les convergences sont plus nombreuses qu’on le croit, même si les vocabulaires sont piégeant. Les concepts demandent à être éclairés et confrontés. La « présence symbolique » des Eglises évangéliques, la présence réelle telle qu’envisagée par les Eglises de la CEPE sont-elles si éloignées en fait de la présence réelle sous un mode non physique ? La transsubstantiation si chère à l’Eglise catholique est-elle la meilleure façon de parler du mode de présence de Jésus-Christ dans l’eucharistie étant donné qu’elle se base sur des principes de physique aristotélicienne que l’on sait aujourd’hui fondamentalement faux et que le physicisme est repoussé par la théologie catholique ?
La recherche de l’Unité des Chrétiens passe par ces deux chantiers. Ils sont nécessaires pour qu’un accueil au Repas du Seigneur puisse se réaliser de manière ordinaire. La réalisation d’une supra-Eglise qui engloberait tout n’est pas nécessaire et serait même -à mon avis- un appauvrissement.
Il n’est pas nécessaire d’avoir un même évêque pour communier à la même table. Il faut reconnaître dans le pain et le vin, mangé et bu, la présence du Seigneur réalisée selon sa parole. (Lc 22,17-20). Les Eglises orthodoxes sont diverses et se reconnaissent entre elles en communion. La Concorde de Leuenberg unit les Eglises protestantes d’Europe qui restent diverses mais en communion de chaire et d’autel au minimum.
Ce qui nous unit est une même foi en Jésus-Christ qui par amour pour nous est mort et ressuscité, est retourné vers le Père, et qui nous libère du péché. Les évêques, successeur dans la foi des apôtres étaient douze et Pierre avait une fonction d’unité[13], jusqu’à ce que l’orgueil confessionnel, la volonté de puissance (et je pourrai citer en plus les six autres péchés capitaux) nous aient séparés.
Les théologies particulières, parfois (souvent !) volontairement antagonistes, ont été un formidable moyen d’exclusion des uns par les autres. Elles peuvent devenir une richesse. Elles le sont déjà. Les dialogues engagés en sont les prémisses.
Tous nous avons à travailler pour le Seigneur. Pas pour nos « chapelles » : « Quand l’un déclare : “Moi, j’appartiens à Paul,” l’autre : “Moi à Apollos,” n’agissez-vous pas de manière tout humaine ? Qu’est-ce donc qu’Apollos ? Qu’est-ce que Paul ? Des serviteurs par qui vous avez été amenés à la foi ; chacun d’eux a agi selon les dons que le Seigneur lui a accordés. Moi, j’ai planté, Apollos a arrosé, mais c’est Dieu qui faisait croître. Ainsi celui qui plante n’est rien, celui qui arrose n’est rien : Dieu seul compte, lui qui fait croître. Celui qui plante et celui qui arrose, c’est tout un, et chacun recevra son salaire à la mesure de son propre travail. Car nous travaillons ensemble à l’œuvre de Dieu, et vous êtes le champ de Dieu, la construction de Dieu » (1Co 3,4-9)
[7] PAPE JEAN-PAUL II. Lettre encyclique « Ut unum sint » sur l’engagement œcuménique du 25 mai 1995. Cerf/Flammarion Paris 1995, n° 10 et 11 pp 13 et 14. ISBN 2-204-05258-2
[8] CONSEIL ŒCUMENIQUE DES ÉGLISES – FOI ET CONSTITUTION. Baptême, Eucharistie, Ministère, Paris, le Centurion – Presses de Taizé, 1982. Disponible sur le web : http://documentation-unitedeschretiens.fr/
[9] Avec le document de la Commission Théologique Internationale de l’Eglise Catholique sur « L’espérance du salut pour les enfants qui meurent sans baptême (2007) » la vieille malédiction augustinienne qui damnait les enfants morts hors baptême est tombée. Les limbes sont tombés au niveau de l’option théologique possible (n°40). J’aurais plutôt tendance à dire qu’au vu du texte c’est désormais une option théologique impossible. Et c’est tant mieux. Du fait de la non nécessité absolue du baptême des petits enfants, ce peut être un élément positif vers une compréhension commune du baptême. Cf : L’espérance du salut pour les enfants qui meurent sans baptême : http://www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/cti_documents/rc_con_cfaith_doc_20070419_un-baptised-infants_fr.html
Homélie du Père François Michon, supérieur général de la Communauté du Chemin Neuf, pendant l’office pour l’unité à l’abbaye de Hautecombe, le 16 avril 2020.
Gn 1,26-28 : « Dieu dit : « Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance, et qu’il soumette les poissons de la mer, les oiseaux du ciel, les bestiaux, toute la terre et toutes les petites bêtes qui remuent sur la terre ! Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa ; mâle et femelle il les créa. » Dieu les bénit et Dieu leur dit : « Soyez féconds et prolifiques, remplissez la terre et dominez-la. Soumettez les poissons de la mer, les oiseaux du ciel et toute bête qui remue sur la terre ! » Dominer et soumettre : dans la genèse ces deux verbes soulignent la ressemblance de l’Homme avec Dieu. Ce n’est pas un permis d’abuser ![1]
Le pape François, dans l’introduction de son encyclique « Laudato Si » redit cette vérité : « Laudato si’, mi’ Signore », – « Loué sois-tu, mon Seigneur », chantait saint François d’Assise. Dans ce beau cantique, il nous rappelait que notre maison commune est aussi comme une sœur, avec laquelle nous partageons l’existence, et comme une mère, belle, qui nous accueille à bras ouverts : « Loué sois-tu, mon Seigneur, pour sœur notre mère la terre, qui nous soutient et nous gouverne, et produit divers fruits avec les fleurs colorées et l’herbe ». Cette sœur crie en raison des dégâts que nous lui causons par l’utilisation irresponsable et par l’abus des biens que Dieu a déposés en elle. Nous avons grandi en pensant que nous étions ses propriétaires et ses dominateurs, autorisés à l’exploiter. »[2]
Nous sommes créés libres et responsable de la manière dont nous utilisons et prenons soin de la terre.
Aujourd’hui nous sommes « frappés » par cette épidémie de Coronavirus Covid-19. Non pas par une quelconque fatalité, mais parce qu’un gouvernement totalitaire refuse de regarder en face ses responsabilités qu’elle a tenté de faire partager par des pangolins et maintenant des chauves-souris…
Des autorités chinoises qui ont d’abord tenté d’étouffer la nouvelle et qui ainsi portent une grande part de responsabilité, mais pas seulement.
Les réactions des politiques de tout bord pour le moins érratiques ou irresponsables.
Plus tous les égoïsmes qui se révèlent: individuels, collectifs, institutionnels.
Et heureusement de belles choses aussi souvent au niveau personnel.
J’ai écrit « frappé » entre guillemets parce que ce n’est pas le résultat d’un malheur extérieur mais bien le résultat de notre action humaine. Et les conséquences sur les populations pauvres dans le monde vont être terrifiantes.
Le péché et la bêtise couplée ont fait à ce jour plus de 96000 morts dans le monde. Et on est encore en phase montante de la pandémie.
Et ce n’est qu’un des aspects de la bêtise et du péché à l’œuvre contre la Création.
Alors on a fait des tas de prières et des cultes et des divines liturgies pour demander à Dieu de nous délivrer de ce fléau.
Mais c’est inutile. Dieu n’y peut rien. Ce qui nous arrive est le produit de la façon destructrice dont nous utilisons notre liberté d’agir sur la création qui nous est soumise. Et Dieu n’ira pas contre notre liberté.
L’ Esprit Saint peut nous inspirer la voie à suivre, et c’est pour cela seulement et pour les malades que nous pouvons prier.
En ce vendredi saint 2020 nous crucifions Dieu encore et encore à travers ses créatures et sa création.
Puissions-nous entendre Jésus du haut de sa croix nous redire
” Père pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font “.
Protestinfo est une agence de presse spécialisée dans l’actualité des Églises réformées de Suisse romande. Elle diffuse une information libre et loyale touchant également aux questions d’éthique, de société et de spiritualité.
Si le terme employé fait débat et est maladroit, la teneur des réactions est plutôt intéressante dans sa modération.
Il n’en reste pas moins qu’il serait plus que temps que mon Eglises arrête de dire les choses du 21°siècle avec les mots du 16° siècle, surtout s’ils ont été vecteur de division.
Geo
27 mars 2020
Anne-Sylvie Sprenger
La récente déclaration du pape quant à l’indulgence plénière accordée aux malades du coronavirus [1] a suscité de vives réactions auprès des protestants, qui ont largement exprimé leur consternation sur les réseaux sociaux. Mais n’y aurait-il pas un malentendu, sur les mots et les intentions?
L’annonce a été faite le 20 mars, dans le contexte de crise sanitaire extrême que connaît en particulier l’Italie. Par voie de décret, le Vatican a annoncé que l’Église catholique accordait l’indulgence plénière aux malades du coronavirus sous certaines conditions. Une déclaration qui n’a pas manqué d’indigner nombre de protestants, qui ont relayé l’info sur les réseaux sociaux avec la plus vive consternation.
«Encore une fois, je me suis dit: “L’Église catholique en est encore là?” Encore à faire de Dieu un comptable qui récompense chacun, chacune selon ses bonnes ou mauvaises actions? Encore à s’arroger le pouvoir d’influencer le jugement de Dieu», confie Olivier Bauer, théologien réformé. Charlotte Kuffer, l’ancienne présidente de l’Église protestante de Genève, qui se dit «profondément attachée à la communion des Églises chrétiennes, exprime également sa «désespérance de protestante, de ne pouvoir partager une compréhension du pardon qui se nourrisse du “sola gratia” qui mette en avant l’amour de Dieu sans condition.» Chez les protestants, le pardon est en effet accordé par la seule grâce de Dieu, par le moyen de la foi.
Un persistant malentendu
La déclaration aurait-elle dès lors réveillé les divergences théologiques entre les deux confessions? «La question des indulgences est un des points majeurs de décrochage entre les deux Églises et contre laquelle les réformateurs se sont battus», rappelle l’historien du christianisme Michel Grandjean. «Or l’un des problèmes est que la majorité des protestants comme des catholiques ne comprennent pas vraiment de quoi il s’agit; ils confondent pardon et indulgence.»
Pour Jean-Marie Brandt, ancien président de la Fédération ecclésiastique catholique romaine du canton de Vaud, «il n’y a pas de confusion possible. Le pardon ne vient que de Dieu. L’indulgence, quant à elle, vise à réconcilier la personne avec elle-même et sa communauté.» Le théologien Jean-Baptiste Lipp, président de la Conférence des Églises réformées romandes (CER), invoque également l’existence d’un «malentendu»: «Il ne s’agit pas de remettre en question la théologie de la grâce, sur laquelle luthériens et catholiques se sont accordés en 1999.» Pourtant, estime-t-il, «probablement que les catholiques jouent sur cette ambiguïté…»
Face aux réactions des protestants, Jean-Marie Brandt admet regretter «un manque de précaution de la part des autorités vaticanes: elles auraient pu anticiper les réactions des autres confessions en rédigeant un communiqué plus clair». Cela aurait-il suffi? Pas sûr, car restent les conditions auxquelles sont soumis les fidèles pour bénéficier de ces indulgences.
Des conditions qui dérangent
«L’intention de rejoindre les malades auxquels on n’a plus accès est belle dans l’intention, on voudrait la respecter, mais les modalités ont de quoi nous désarçonner», énonce le théologien réformé Christophe Chalamet. Outre l’injonction de réciter diverses prières et invocations à la Vierge Marie, accompagnées sous recommandation d’un chapelet ou crucifix, c’est le minutage de la lecture de la Bible qui a choqué les protestants. En effet, la Pénitencerie apostolique accorde l’indulgence plénière «à ceux qui s’adonnent à la lecture de la Sainte Écriture pendant au moins une demi-heure». Si les réformateurs pourraient se réjouir de cette appel soutenu à lire la Bible, il n’en reste pas moins que, «même s’il n’y a pas de monnaie trébuchante, on est quand même dans le registre du donnant-donnant», s’indigne Christophe Chalamet.
L’historien Michel Grandjean souligne néanmoins qu’ici «les conditions sont réduites au minimum», contrairement à ce qui a pu être requis à d’autres époques (argent, pèlerinage, etc.). «Cela donne l’impression d’une entreprise qui propose un discount – c’est quasiment les soldes», ironise-t-il. Olivier Bauer se veut plus critique: «Sous couvert de compassion, la Pénitencerie apostolique sous l’autorité du souverain pontife profite de l’épidémie de Covid-19 pour tenter de réaffirmer un pouvoir qui lui échappe.» Au contraire, répond Jean-Marie Brandt: «Le pape renonce ainsi au rôle d’intermédiaire de l’Église, et invite à la responsabilité directe entre le Créateur et sa créature» – l’essence même de la théologie réformée.
Répondre à l’urgence
Du côté de l’Église évangélique réformée de Suisse (EERS), on se veut plus accueillant. «Le pape n’invente pas de nouveaux critères, les décrets correspondent à la doctrine et aux normes juridiques de l’Église catholique. Le Vatican ne propose pas de marchandage ni ne distribue de billets à prix réduit pour le Royaume des cieux, mais réagit à une situation dramatique», insiste Frank Mathwig, chargé des questions théologiques et éthiques au sein de l’institution.
«Certes, cette déclaration nous laisse un petit goût de rebouilli du 16e siècle», atteste Jean-Baptiste Lipp. «Mais face à l’épreuve, chaque Église dispose d’une pharmacie de trésors spirituels pour accompagner ses fidèles. Il est donc normal qu’elle les utilise.»
«Après de telles déclarations, on se sent un peu étrangers les uns aux autres», confie pour sa part Christophe Chalamet. «Mais il ne faudrait pas oublier l’intention derrière ces pratiques d’un autre âge, qui est de rejoindre les personnes en souffrance, là où elles se trouvent», ajoute-t-il. «C’est ça l’essentiel.» «Cet appel aux catholiques devrait peut-être aussi nous inviter à renouer avec ce qui, dans notre tradition réformée, peut nous aider et nous relier à la Source», estime par ailleurs le président de la CER. «Car si l’amour de Dieu est universel, est-ce que je tends la main vers ce qui m’est offert?»
Des désaccords théologiques perdureront encore entre les deux confessions, mais «c’est dans la solidarité avec les malades, les mourants, ceux qui les aident et leurs familles que l’œcuménisme se révèle le plus efficace», rappelle le théologien de l’EERS. «L’œcuménisme est un long chemin, encore jonché de grosses pierres qui nous déstabilisent», enchaîne Charlotte Kuffer: «La pratique œcuménique de terrain, à travers notamment du travail des aumôniers, est ce que les chrétiens ont de plus précieux.»
La jeune fille qui reçoit la visite de l’Ange (Lc 1) est dans le présent d’une vie humaine ordinaire. Ce qui va changer radicalement le cour de sa vie c’est cette annonciation et la réponse qu’elle y donne.
L’Ange du Seigneur, expression de la parole de Dieu dans le temps humain, est toujours fracture dans cet espace limité qui se développe dans un temps qui s’écoule heure après heure sans possibilité de retour en arrière ni accélération vers l’avant.
Dieu, lui, est dans la non-temporalité ” A tes yeux Mille ans sont comme hier, comme un jour qui s’en va, une heure dans la nuit” (Ps 89,4). Dieu n’est pas présent à l’instant “T” du présent de l’histoire humaine, il est présent à toute l’histoire humaine. D’où son nom révélé a Moïse: “Je Suis”
L’irruption de l’Ange dans le présent de Marie, c’est l’irruption de l’intemporalité de Dieu dans sa vie de femme humaine. Sa réponse va être adhésion à ce plan de Dieu.
Il faut s’arrêter sur les versets 31-35 du chapitre 1 de l’Evangile de Luc: Les paroles de l’Ange ne peuvent se comprendre qu’a partir de sa “position” dans le plan de Dieu. Il lui expose ce qui va se passer alors qu’elle n’a pas ouvert la bouche, comme si tout était déjà d’accord !
Alors qu’en est-il de la liberté de Marie?
En fait sa réponse est totalement libre. Simplement elle est déjà connue de Dieu.
Son “fiat” va être mise en conformité de son “temps humain” avec l’intemporalité de Dieu. En recevant le message de l’Ange, elle entre de plein pied dans le vouloir de Dieu. Le terme qu’emploie Marie dans sa réponse n’est pas “servante du Seigneur” comme (mal) traduit le plus souvent, mais “esclave du Seigneur”. Elle se désapproprie de tout ce qu’elle est. Et cela a des conséquences. En acceptant que soit engendré en elle celui qui est “sans péché” le Saint (v 35) elle va être elle-même crée sans ce péché originel qui est rébellion contre Dieu
Son “fiat” entraîne son “innocence”. C’est donc dans la dynamique de son don total d’elle même à la volonté de Dieu qu’elle est faite “immaculée conception”, comme re-créée par Dieu pour recevoir Jésus. En entrant dans le “plan de Dieu” c’est toute sa vie qui est sanctifiée de sa naissance à sa mort.
Dieu “sait” que Marie va exercer sa liberté dans le sens de la grâce. Marie n’est pas prédestinée. Mais son oui prononcé dans l’espace-temps humain résonne de toujours à toujours dans l’intemporalité de Dieu. “L’immaculée conception” n’est pas a envisager dans le sens d’une préparation de Marie a dire oui, mais bien la conséquence de son oui à entrer dans l’intemporalité de Dieu (v 38)
Mon frère, le Père André Fournier est décédé le 8 février au domicile Rennais de ses amies Christine et Odile Abrioux-Bedouet, entouré de leur affection et de leurs soins des suites d’un cancer inguérissable, âgé de 73 ans.
André, après un CAP de fraiseur en 1965 et un CAP de dessinateur en constructions mécaniques en 1966 a travaillé comme agent technique jusqu’en 1976.
Servir était la devise des Routiers Scouts de France. C’est profondément marqué par ces valeurs du scoutisme que toute sa vie va être mise au service des autres dans ses diverses responsabilités et engagements, que ce soit dans le scoutisme ou l’animation liturgique, et qui se continuerons dans le monachisme ou dans le ministère sacerdotal.
Son parcours il en parle dans une interwiew à la Croix en 2007:
«Enfant, j’habitais Montmartre à Paris : sur un mont, déjà ! J’avais 5 ans quand je suis venu au Mont pour la première fois. Je me souviens de mon choc en voyant, du fond de la baie, cette pyramide posée sur le sable. J’y suis revenu à 26 ans en tant que responsable scout, et pendant trois ans j’ai séjourné régulièrement au sein de la petite communauté monastique de l’époque, dont le prieur était le Père. Bruno de Senneville, bénédictin du Bec Hellouin.
Lors d’une retraite, j’ai eu la certitude que Dieu me demandait de rester là et en 1976, j’entrais dans cette communauté. Cela fait donc trente et un ans que je vis sur le Mont. Il me fascine toujours autant, et j’éprouve un coup au cœur à chaque fois que j’y reviens après quelques semaines d’absence… Cela n’empêche, la vie y est difficile : le Mont est un lieu de combat spirituel, mais aussi physique et psychologique.”
André entre-temps, est ordonné diacre dans l’abbatiale du Mont en 1983, puis prêtre dans la cathédrale de Coutances en 1984.
Pendant quatre ans, il se partage entre Pontorson (à 7 km) et le Mont, où il est moine hôtelier.
En 1989, ses frères et soeurs l’élisent prieur de la communauté. Mgr Fihey, l’évêque de Coutances d’alors, l’autorise à cesser ses deux mi-temps.
En 1995, André est nommé administrateur de la paroisse du Mont Saint-Michel avant de devenir, l’année suivante, recteur du sanctuaire – tout en demeurant prieur de la communauté de l’abbaye jusqu’en 2001 ou il favorise l’arrivée et l’accueil des Fraternités Monastiques de Jérusalem pour remplacer la trop petite communauté pour qui la tâche est devenue trop lourde.
Avec le Père François Lancelot, 87 ans, il s’installe alors dans le village, à la maison du Pelerin, à proximité de l’église paroissiale Saint-Pierre – qui est aussi l’église du sanctuaire du Mont depuis dix siècles et y fonde la librairie Siloe “pour qu’on puisse acheter une bible sur le Mont”
Il est nommé directeur diocésain des pèlerinages en 2001.
En 2009, tout en restant recteur du Sanctuaire du Mont Saint-Michel, il deviendra curé de la paroisse Notre-Dame de la Paix de Pontorson, en charge de 16 clochers. Et en septembre 2018, il accepte d’être administrateur de la paroisse de Saint Michel de Ducey
André était membre de l’Association Chrétienne Oecuménique de Normandie et la présence de ministres de la Communion Anglicane et de l’ Eglise Evangélique Protestante témoigne de son attachement discret mais profond à la la promotion de l’unité des chrétiens.
(Eléments d’articles publiés avec l’aimable autorisation de la rédaction du journal La Croix)
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